Je ne suis pas infectiologue, ni toxicologue.
J’avais décidé de ne pas parler du coronavirus.
Autant en 2009 pendant l’épidémie de grippe H1N1, il m’avait semblé utile de décrypter les informations médicales étrangères au fur et à mesure de leur parution, en ce qu’elles révélaient l’écart grandissant entres les connaissances scientifiques qui s’accumulaient peu à peu ( de le relative bénignité de cette grippe dans la majorité des cas), et les décisions gouvernementales débiles du couple maudit Sarkozy-Bachelot, avec mise à l’index des médecins généralistes « incapables de respecter la chaîne du froid », mise en place de vaccinodromes dispendieux et inutiles, délire de la DGS sur l’administration de Tamiflu au moindre éternuement, stratégie de la peur et de la tension… autant la gestion actuelle de l’épidémie et la diffusion des informations me semblait rendre inutile d’ajouter à la confusion. Et puis hier, rapidement, suite à une la mise en ligne par le Professeur Didier Raoult d’une courte présentation sobrement intitulée « Coronavirus: fin de partie! », les choses ont changé. Je serai court Oui, on savait que les équipes chinoises testaient diverses molécules déjà existantes pour voir si elles avaient une efficacité contre Covid_19. Oui, on savait qu’in vitro la chloroquine, un médicament ancien et peu onéreux utilisé pour la prévention du paludisme semblait efficace On apprend qu’une équipe chinoise aurait rencontré un succès avec cette molécule sur de nombreux patients, in vivo ( mais à ce stade c’est une pré-publication, procédure qui permet de faire passer rapidement l’information mais qui ne préjuge pas de sa véracité parce qu’on n’a pas les données chiffrées et qu’ensuite il faut vérifier) Ce qui est problématique dans cette affaire, c’est la volonté de faire le buzz. Et ce que cette volonté entraîne ensuite chez une population inquiète. Les cabinets de médecine générale, mais surtout la régulation du 15, sont submergés d’appels inquiets au sujet du coronavirus, malgré des informations plutôt claires publiées par les autorités de santé et un numéro vert dédié. Au point que cela impacte le fonctionnement de la régulation du SAMU. Les propos de Didier Raoult se veulent rassurants, mais il fait preuve d’une grande légèreté en insinuant que la messe est dite, l’affaire est pliée, circulez il n’y a à rien à voir « Fin de partie! » ( avec le point d’exclamation qui va bien) Et surtout, au détour d’une phrase, Didier Raoult classe la chloroquine parmi ces médicaments anciens à tester « dénués de toute toxicité », ce qui n’est absolument pas le cas. Au contraire, la chloroquine ou Nivaquine est l’une des molécules dont la dose toxique est très proche de la dose thérapeutique utilisée. Et comme il s’agit d’un médicament, certes accessible uniquement par prescription d’un médecin, mais qui traîne dans un très grand nombre de pharmacies, puisque les gens qui partent dans certains pays où il existe du paludisme s’en voient prescrire par boîte de 100 comprimés… laisser croire que la chloroquine n’a pas de toxicité est extrêmement dangereux. La chloroquine peut entraîner des accidents cardiaques graves d’emblée, sans signe prémonitoire.
Dans le contexte actuel de méfiance généralisée par rapport à la parole scientifique, de défiance par rapport aux gouvernements, de prise de conscience ( tardive et parfois disproportionnée) de l’influence de Big Pharma, et alors que la crainte des débuts laisse place à une véritable panique chez certains à chaque nouveau cas recensé, le risque que des gens inquiets s’automédiquent ( parce qu’on nous cache tout on nous dit rien le gouvernement veut tuer les vieux pour régler le problème des retraites) en prenant de la Nivaquine n’importe comment n’est pas nul
Donc
Si vous avez de la Nivaquine chez vous, n’y touchez pas sans avis médical. N’en prenez pas en pensant vous protéger. Attendez que les données médicales soient examinées, validées ( ça va aller vite vu l’urgence) et qu’une stratégie de prise en charge cohérente soit adoptée.
PS: Je ne suis pas infectiologue ou toxicologue.
Je ne suis pas jaloux du grand professeur.
Je sais que vous avez déjà pris de la Nivaquine pendant des semaines sans risque, et votre belle-soeur aussi.
Pour ce qui est de dénoncer cette prise de parole parce que j’aurais sûrement des liens avec Big Pharma ou La République en Marche ou les illuminati reptilien, désolé mais j’ai poney aquatique Mise à jour au 27 Février 2020: Depuis sa première vidéo, Didier Raoult a enfoncé le clou, se répandant sur les bienfaits de la chloroquine, fustigeant les imbéciles qui attendent les données vérifiées, ou ceux qui pointent le risque de mésusage du produit dans une atmosphère de panique. La palme de l'irresponsabilité est atteinte avec ceci: "C’est un médicament qui est extrêmement sûr et qui est le moins cher qu’on puisse imaginer. C’est donc une super bonne nouvelle ! Tous les gens qui ont connaissance de ces bienfaits devraient se jeter dessus." Se jeter dessus.... Ce propos est non seulement anti-déontologique, mais criminel de par sa légèreté.
Christian Lehmann
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