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Chapitre 7

Manifeste contre les mensonges de la réforme ( Quatre salauds et un enterrement )

Fin 2004, la mise en place de la réforme s’accélérait. Jusqu’au dernier moment, les syndicats de salariés, les syndicats médicaux, les mutuelles, le Medef, avaient participé aux discussions, cherchant à infléchir certains détails du plan en préparation. Mi-Décembre, de manière brutale et inattendue, un amendement législatif voté en catimini à l’Assemblée sonna un coup de semonce pour les médecins généralistes, et le syndicat MG France en particulier. La convention médicale issue de la loi de réforme, que vont négocier ensemble les syndicats médicaux et les caisses d’assurance-maladie sous la houlette de leur directeur, effacera les précédentes. Cela n’a l’air de rien, mais c’est lourd de conséquences, dans une France qui a l’habitude d’empiler les textes législatifs et administratifs, ajoutant toujours à l’existant sans jamais rien retrancher des droits acquis. En clair, cela signifie que les accords existants entre l’assurance-maladie et les médecins, les accords négociés sous des gouvernements antérieurs, vont tous être passés au crible de la négociation. Ne seront reprises que les dispositions que les signataires décident d’intégrer. Pour le reste, du passé ils feront table rase. Immédiatement, au lendemain de ce vote, les généralistes cherchent à se mobiliser. Car si le ministre Douste-Blazy va bientôt claironner partout sur les plateaux que la convention médicale naissante est une formidable avancée, qu’elle succède à un vide conventionnel de près de dix ans, il s’agit d’un mensonge éhonté, d’ailleurs très symptomatique du peu de cas que ce membre de la caste médicale hospitalo-universitaire fait de la médecine générale. Car il est faux de dire que la convention de 2005 succède à un grand vide. Bien au contraire, les généralistes ont signé avec les caisses d’assurance-maladie, sous le règne de MG France, une convention spécifique qui a permis à la profession généraliste de bénéficier de quelques revalorisations tarifaires et qui a accompagné, même imparfaitement, l’informatisation des cabinets de médecine générale, bref, qui a donné aux médecins généralistes un cadre d’exercice. Cette convention spécifique a toujours été combattue par la CSMF du Dr Michel Chassang et par le SML du Dr Dino Cabrera. L’idée que les médecins généralistes s’émancipent de la tutelle syndicale polycatégorielle et se permettent de négocier des accords de branche leur a toujours été anathème. Cette convention spécifique, signée par MG France et la CNAM, court normalement jusqu’en 2006, à moins d’être révoquée par l’une des parties, ce que ni MG France ni la CFDT n’a l’intention de faire. D’un côté comme de l’autre, ces « partenaires », adeptes de la négociation et de la signature, espéraient passer l’orage de la réforme en poursuivant les réformes engagées. L’amendement de Décembre 2004 change radicalement la donne. Tout ce qui a été conquis de haute lutte par les généralistes pendant des années est maintenant en danger, au bon vouloir des signataires. Les députés ne s’en sont absolument pas rendu compte, comme souvent, hélas. Quelles explications leur a-t-on donné, d’ailleurs ? L’argument de la simplification administrative a pu être efficace, si tant est qu’ils y aient prêté attention. Plus probablement, au sein de l’UMP, ont-ils obéi à une consigne de vote venue du sommet. La suite des évènements montrera aux généralistes qui tenteront de saisir leurs députés que les parlementaires, dans leur majorité, ont parfaitement maîtrisé la fonction « copier-coller » de leur logiciel de traitement de texte. Alertés par des médecins généralistes déboussolés, écoeurés, nombre de députés UMP répondront par des lettres-type reproduisant à la virgule près l’argumentaire du ministère de la Santé, et témoignant d’une méconnaissance totale des questions de santé.

Au sein de l’organisation MG France, c’est l’heure des tiraillements, des déchirements. Pour son président, le Dr Pierre Costes, le coup est rude. L’homme, généraliste de terrain en milieu rural, successeur du charismatique fondateur Richard Bouton, est un authentique défenseur de la cause généraliste, mais les analyses de l’équipe dirigeante n’ont pas suffisamment pris en compte les manœuvres politiques qui sous-tendent cette réforme. Emportés par une vision idyllique de l’évolution du métier, les stratèges de MG France ont axé leur communication auprès des généralistes, depuis de nombreuses années, sur l’ « interprofessionnalité ». Le mot ne brille pas par sa « compréhensibilité », mais nul doute, selon le slogan en vigueur dans la maison, que les confrères finiront bien un jour par « s’approprier le concept » ! Pierre Costes et son équipe défendent l’idée que demain l’exercice solitaire de la médecine générale sera dépassé. Que, comme dans de nombreux pays étrangers, les médecins auront tendance à se regrouper, non seulement entre eux, mais, et c’est là la vraie nouveauté, à partager leurs locaux et leur exercice avec d’autres professionnels de santé : infirmières, kinésithérapeutes, orthophonistes, etc… Cette belle idée de « médecine utopique », d’exercice interprofessionnel, ils la croient à portée de main, à portée de la volonté politique. Partout les gestionnaires, les économistes, parlent d’exercer la médecine en réseau, de partager les informations entre professionnels de santé, de décloisonner le système enfermé dans ses archaïsmes catégoriels. MG France, sous la férule de Pierre Costes, a œuvré dans ce sens, tissant des liens avec d’autres organisations syndicales de professionnels de santé, préparant l’avenir, un avenir radieux, forcément radieux. Mais, les yeux fixés sur l’horizon, ils viennent de buter sur la triste réalité. Alors que depuis plusieurs années le syndicat, loin des années de combat de ses débuts, cherche à renouer les liens avec les syndicats de spécialistes dans le but de mettre en œuvre ensemble une meilleure organisation du système de santé en France, CSMF et SML fourbissaient leurs armes en vue du grand soir de leur revanche. En 2003, alors que certains spécialistes choisissaient la voie du déconventionnement, Pierre Costes déclarait : « Ce qui nous inquiète, c'est que les 60% de spécialistes libéraux qui sont en secteur 1 ne peuvent pas monter des systèmes de coordination de soins avec les autres professionnels. Ces spécialistes sont en train de se faire tailler des croupières par l'hôpital public, qui bénéficie de tous les investissements. Nous, nous ne pouvons admettre que les médecins spécialistes disparaissent au profit de l'hôpital, car alors les généralistes se retrouveraient en prise directe avec l'hôpital. Face à cela certains proposent à ces spécialistes le fantasme d'une liberté tarifaire à l'américaine qui ne correspond pas à la culture française. Par ailleurs, je comprends que certains syndicats (représentant les spécialistes) aient pu s'imaginer, pendant un temps, mener des négociations directes avec le gouvernement et non avec les caisses. Mais maintenant les choses sont claires. Jacques Chirac vient de rappeler que la gestion de la médecine de ville était déléguée aux régimes de Sécurité sociale et aux régimes complémentaires…Il faut que les spécialistes qui s'engagent dans des accords de bon usage des soins, des accords de pratique professionnelle, des contrats de santé publique bénéficient d'une prise en charge normale de leurs cotisations sociales par la Sécurité Sociale ».

Alors que le Président du principal syndicat de généralistes français s’inquiète pour l’avenir de la médecine libérale spécialisée, et plaide pour un retour des spécialistes de ville à l’intérieur du système conventionnel à ses côtés, SML et CSMF attendent leur heure, l’heure où contrairement aux promesses affichées par Jacques Chirac, le gouvernement, ayant mis les syndicats de salariés en touche, va à nouveau se tourner directement vers ses alliés objectifs en vue de préparer une réforme qui réconcilie enfin l’UMP et la caste médicale.

En Septembre 2004, alors que la réforme se profilait,  Pierre Costes avait encore voulu croire que le « médecin traitant » s’appuierait sur les systèmes de coordination existants, dont le médecin référent : « le nouveau ministre a su ramener les syndicats de médecins spécialistes dans une attitude de négociation et de construction d'accord. Il faudra voir si cette attitude suffit à faire aboutir des accords... » Fidèle à sa ligne de défense d’un égal accès aux soins pour tous, il plaidait pour une absence de pénalisation des patients qui s’inscriront dans un dispositif vertueux : « Pour ce qui concerne les mesures dites de responsabilisation comme le UN euro par consultation, les patients inscrits, chez un traitant ou un référent pourraient en être dispensés. C'est la logique d'un système de soins organisé, garantissant la prise en charge des patients vertueux dans un système lui aussi vertueux ».

Pour MG France, le réveil est brutal, sidérant. Alors que les militants espéraient œuvrer ensemble pour la construction d’un système de soins optimisé dans un environnement syndical apaisé, ils se retrouvent soudain confrontés à une épreuve de force violente, dans laquelle les syndicats polycatégoriels et le gouvernement agissent sans aucun ménagement : la convention spécifique des généralistes est abolie, et avec elle, le système du médecin référent. Pour les 15% de généralistes qui ont choisi ce système et s’y sont impliqués, c’est une catastrophe, financière et morale. Sur le plan syndical, c’est une manœuvre dont les conséquences seront incalculables. Pour les patients, c’est l’abandon d’un projet d’organisation des soins incitatif et non pénalisant, basé sur l’éducation du patient, au profit d’un système coercitif de « responsabilisation par l’argent », conforme à l’idéologie néolibérale.


A la fin 2004, dans le sang et les larmes, les négociations conventionnelles aboutissent. Les syndicats de salariés ayant été réduits à faire de la décoration, c’est Frédéric Van Roekeghem, président de l’UNCAM, qui, en lien avec l’Elysée, a « négocié » en toute indépendance avec la CSMF et le SML une convention que refusent les autres organisations. 

MG France refuse bien évidemment d’apposer son paraphe sur un document qui annule toutes les avancées qu’avaient obtenu les généralistes les années précédentes, de la convention spécifique à l’option référent, destinée par les signataires à une mort programmée dans les deux ans. C’est sur la FMF, jusqu’au dernier moment, que se sont exercées les amicales pressions pour décrocher une signature. A plusieurs reprises, le téléphone portable des négociateurs de la FMF a sonné, les plus hautes instances du ministère et de la République faisant miroiter au syndicat les avantages octroyés aux signataires. Plutôt qu’une opposition stérile ( puisque suffisent pour entériner la convention les signatures de la CSMF, du SML, et du micro-syndicat Alliance), c’est à une belle et grande aventure que Philippe Douste-Blazy et le cabinet de la Présidence de la République appellent le docteur Jean-Claude Régi et le docteur Jean-Paul Hamon. Pour l’un comme pour l’autre, le choix est cornélien. La FMF peut légitimement être tentée par la prime à la signature. D’autre part, on fait miroiter au docteur Hamon, généraliste issu des coordinations, la possibilité d’une représentativité de sa section généraliste au sein de la FMF, jusque-là refusée par le gouvernement dans des conditions d’une opacité qu’on imagine. L’enjeu, pour le gouvernement et l’UNCAM, est d’importance. Obtenir la signature de la FMF, c’est isoler MG France, c’est briser ce syndicat jugé trop proche de la CFDT et du Parti Socialiste, renvoyer dans les limbes de l’histoire ces généralistes qui, un temps, ont voulu décider seuls de leur sort sans demander l’aval de la caste médicale. Mais la FMF ne cèdera pas, préférant refuser les prébendes conventionnelles plutôt qu’entériner ce que Jean-Paul Hamon, en séance de négociation, a qualifié de trahison. Se tournant vers Michel Chassang, ce généraliste de 58 ans, de tendance plutôt libérale, a considéré comme une ignominie le sort réservé aux médecins référents : « De mémoire de syndicaliste, on a jamais vu supprimer un avantage acquis sans contrepartie, et léser ainsi des confrères. C’est scandaleux, tu ne l’emporteras pas au paradis ». 

Ce refus catégorique ne fait pas le jeu du pouvoir. Sur les quatre principaux syndicats médicaux, deux seulement ont signé. Ceux qui sont le plus engagés dans la préparation de la réforme et en ont inspiré bien des articles. Ceux qui représentent de manière presque caricaturale les intérêts de la médecine spécialisée et ceux des médecins à honoraires libres pratiquant des dépassements. 

Qu’importe. La machine à communiquer est lancée. Philippe Douste-Blazy s’invite sur tous les plateaux, à tous les micros, pour crier la bonne nouvelle. Hosanna au plus haut des cieux. Une convention médicale nous est née, qui signe la mise en place de la réforme du siècle. Réquisitionnés pour la bonne cause, Frédéric Van Roekeghem, directeur de l’UNCAM, et Xavier Bertrand, Secrétaire National à la Santé, vont suivre son exemple. Et d’emblée, ils vont avoir fort à faire. Car dans les derniers jours de décembre 2004, court-circuitant la machine bien huilée de la communication gouvernementale, précédant même l’avalanche de spots radiophoniques lénifiants expliquant que « C’est en changeant tous un peu qu’on peut tout changer », un collectif de quelques médecins généralistes jette dans les rédactions, comme on jette une bouteille à la mer, un « Manifeste contre les mensonges de la réforme »:

« A l’heure où le Ministre de la Santé va parader sur les ondes pour expliquer qu’il a présidé à la signature d’un accord historique sur le « médecin traitant », à l’heure où va se mettre en place une gigantesque campagne de communication de nature à persuader le public que le but poursuivi est la sauvegarde de l’Assurance maladie solidaire, que peuvent faire les acteurs de terrain que sont les généralistes pour alerter l’opinion et révéler que derrière les effets d’annonce dont ce gouvernement s’est fait le spécialiste en matière de cohésion sociale, la réalité nue est toute autre ?

Ce qui sera dit aux patients, c’est qu’un nouveau système de santé se met en place, un système vertueux qui les engage à choisir un médecin traitant, essentiellement un généraliste qui les soignera et les aidera à accéder de manière coordonnée aux avis des spécialistes si cela est nécessaire.

Ce qui sera dit aux patients, c’est que ce système mieux coordonné va générer des économies, et permettre de sauver la Sécu.

Ce qui sera caché aux patients, c’est que s’est déroulé lors de ce simulacre de négociation entre le proconsul nommé par le pouvoir en place et les syndicats médicaux les plus opposés à une vraie réforme du système de santé, le dépeçage en règle de la Sécu.

Ce qui sera caché aux patients, c’est que les économies virtuelles chiffrées et attendues ne seront jamais au rendez-vous, car aucun moyen n’a été donné aux généralistes pour s’acquitter de la fonction administrative supplémentaire qui leur est dévolue. Au point que le système du médecin référent, un système de coordinations de soins autofinancé, optionnel, volontaire, choisi depuis 1997 par près de 8000 médecins et de 1,5 millions de patients, associant rémunération forfaitaire pour les généralistes en échange d’une bonne tenue du dossier et d’une formation médicale indépendante des firmes pharmaceutiques, et tiers payant pour les patients, a été volontairement détruit par les signataires de cette contre-réforme.

Ce qui sera caché aux patients, c’est que les « négociations » ont moins abordé les réelles difficultés de notre système de santé, que les augmentations tarifaires des spécialistes. Aussi justifiées qu’aient pu être les revalorisations des spécialistes de secteur 1 dont les honoraires étaient bloqués depuis de nombreuses années, on peut s’interroger sur le fait que les généralistes, dans leur ensemble, n’obtiennent rien, rien d’autre que la possibilité de pratiquer un abattage à la pièce en voyant disparaître les systèmes de rémunération forfaitaire qui pour la première fois valorisaient le travail fait hors-consultation (coordination des soins, actions de prévention et d’éducation, formation médicale indépendante, mise à jour des dossiers et des bases de données informatiques, amélioration des pratiques...)

Ce qui sera caché aux patients, mais qu’ils découvriront rapidement, c’est que cet accord signé entre les syndicats de spécialistes et le porte-parole du gouvernement sous l’égide du Ministre de la Santé et des ses conseillers issus de ces mêmes syndicats de spécialistes, ne met pas en place le système du médecin traitant, mais son contournement. Car une fois les généralistes, faute de moyens, mis dans l’impossibilité de faire fonctionner le système coordonné, l’accès direct au spécialiste sera facturé avec dépassement d’honoraires généralisé.

Au nom d’une mythique « unité du corps médical », le ministre a déjà salué cet accord comme la première convention signée depuis dix ans. Alors qu’une convention médicale spécifique aux généralistes a existé pendant toutes ces années, qui les a vus s’investir massivement, malgré les difficultés, dans la maîtrise des outils informatiques, la formation continue, la prise en charge de pathologies complexes, la prescription en génériques puis en DCI, génératrice d’économies pour la Sécurité sociale comme pour les mutuelles, et donc pour chaque patient, car l’augmentation des dépenses de prescription est l’une des causes majeures d’augmentation de tarif des mutuelles. Mais cet accord ne concernait que les généralistes, les spécialistes de secteur 1 étant mal défendus, et les spécialistes à honoraires libres refusant de s’investir dans ces accords.

Ici le mépris des hommes politiques issus du sérail pyramidal de l’édifice médical rejoint la logique ultralibérale : le patient doit enfin comprendre que la santé est devenue une marchandise comme une autre ; il doit savoir, obsession des économistes libéraux « combien ça coûte ? », et sortir le chéquier doit devenir pour lui une habitude en passant dans la salle de consultation, quand certains rêvaient encore de prise en charge sanitaire solidaire, égale pour tous.

Cette contre-réforme libérale n’offre aux généralistes aucune perspective hormis la course à l’acte, nez sur le guidon.

A l’heure où la médecine générale est enfin reconnue comme une spécialité à part entière à l’Université, cette contre réforme pose comme principe la supériorité de la médecine d’organe, de l’homme morcelé, sur la médecine générale, médecine de l’homme considéré dans sa globalité. Aux jeunes généralistes, elle fera office de repoussoir. Confrontés à la difficulté de l’exercice quotidien, à la désertification des campagnes par tous les acteurs de santé (généralistes, infirmières, kinésithérapeutes), à la disparition du système du médecin référent qui correspondait en partie à leurs attentes de sortie du seul paiement à l’acte, ils donneront la préférence à des postes salariés ou s’installeront ailleurs en Europe, dans des pays où les politiques savent quelle est la spécificité du médecin généraliste, la prise en charge du patient dans sa globalité, sur le long terme, et non la distribution de bons pour accès au spécialiste.

Aux patients, elle réserve toute sa cruauté, avec la mise en place d’un accès aux soins dépendant des revenus.

A l’industrie pharmaceutique, elle offre un boulevard : entre des généralistes pressurés dont tous les efforts de prescription raisonnée n’auront servi qu’à réévaluer les spécialistes, et des spécialistes à honoraires libres parmi les plus opposés à la prescription hors-marque (DCI et génériques), le coût réel des médicaments va exploser.

Au final, il faudra constater l’échec de cette contre-réforme, en faire porter la responsabilité aux lampistes que sont les généralistes, et ouvrir la porte aux assurances privées, d’un air désolé, en disant que la Sécu, bien malade, n’a pu être sauvée.

Les communicants du Ministre sauront très bien faire.


Sandrine Buscail est Président du Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes

Philippe Foucras est médecin généraliste, fondateur du  Formindep,  collectif pour une formation médicale indépendante au service des seuls professionnels de santé et des patients

Christian Lehmann et Martin Winckler sont médecins généralistes et romanciers

Philippe Le Rouzo est Président du Syndicat Départemental des Médecins Généralistes du Morbihan MG56 Franck Wilmart est médecin généraliste en milieu rural »


Ce texte, conçu dans l’urgence, n’avait qu’une vocation : alerter les usagers sur le double discours qui va leur être tenu, dénoncer le tissu de mensonges que l’on va leur dérouler. Mais sa diffusion par Internet, l’apparition des noms de ses cinq signataires, va générer un mouvement d’ampleur. Bientôt les signatures affluent, de médecins, de citoyens, s’associant et demandant à signer la pétition qui n’en est pas une. En catastrophe, les signataires créent un site internet, tentent de mettre place une procédure de signature automatique alors que des milliers de mails se déversent dans leurs boîtes aux lettres. En quelques semaines, le Manifeste recueillera pas moins de 30.000 signatures. 

Largement relayé dans les médias, le Manifeste n’est pas la seule expression de colère des généralistes. Un très large front reliant MG France, la FMF, le SMG, mais aussi les organisations de formation médicale continue indépendante, le Collége National des Généralistes Enseignants, le Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes, l’Intersyndicale Nationale Autonome des Résidents en Médecine Générale, les dissidents de MG France, soit au total treize organisations, refuse la convention le jour même de sa ratification, le 12 Janvier 2005, par CSMF et SML. C’est la quasi-totalité des généralistes, depuis les jeunes étudiants terminant leurs études en faculté et à l’hôpital, jusqu’aux médecins plus âgés, enseignants blanchis sous le harnais, en passant par une partie non négligeable des généralistes en exercice, qui dénoncent les incohérences de la réforme.

Invité au Téléphone sonne sur France Inter, Frédéric Van Roekeghem va en faire la cruelle expérience. Le standard est rapidement saturé d’appels, de mails de généralistes furieux, dont les interrogations ou prises de position ne manquent pas d’être répercutées à l’antenne, en contradiction avec la communication bien rodée du directeur de l’UNCAM. Hors-antenne, surpris de la vigueur des réactions, celui-ci mettra en doute la représentativité des interventions qui ont eu lieu, et demandera communication de l’ensemble des mails. Il en est probablement pour ses frais lorsqu’il découvre leur virulence, l’un des carabins ayant écrit : « Le type qui me fait perdre 20% de mes revenus du jour au lendemain en m’assommant de tâches administratives, je lui coupe les roubignolles et je les lui fourre dans la bouche ». Imagé, et concis.

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